Sans rancune

 Mon expérience sexuelle se limitait encore à un vague coup d’essai à l’avant d’une bagnole, deux trois cabrioles au camping familial et à quelques petits frottements de braguettes dans des lits d’adolescents.

 Et puis je l’ai rencontré, ce premier mec avec lequel j’ai fait plusieurs fois l’amour. Dans la petite chambre de la cité U, à Lille. Il était beau, drôle, sportif et probablement destiné à un avenir brillant, comme  papa. 

Après un mois de baise maladroite mais intensive, il m’a quittée. Par SMS. J’entends encore le Bip de mon Alcatel à antenne. Je vois encore ce message, «je t’aime bien, mais ça s’arrête là». Je sens encore mon coeur s’emballer, la décharge d’adrénaline dans mon bide. Les larmes me monter aux yeux. J’oscillais entre tristesse et colère. Je ne méritais pas mieux qu’une petite dizaine de mots balancés du bout des doigts… 

Alors quoi ? Lequel de ces deux sentiments fallait-il laisser s’exprimer ? La peine d’un coeur brisé ou la rage de la femme humiliée ? Me rabaisser plus encore en essayant de comprendre, voire de le reconquérir ? Ou chercher la meilleure vengeance possible ?

J’aurais pu flinguer son avenir sexuel en balançant des rumeurs sordides. Mais je ne connaissais pas ses amis.

J’aurais pu l’attendre, tapie dans le hall de son immeuble, et le harceler. Mais j’aurais eu l’air complètement désaxée.

J’aurais pu partir à la recherche de sa nouvelle nana et lui casser la gueule. Mais je suis nulle en bagarre.

J’aurais pu prendre ma plume, et me lancer dans la rédaction d’un pamphlet. Mais je n’écrivais pas encore.

J’aurais pu, mais je n’ai rien fait. 

Je n’ai pas trouvé la meilleure vengeance possible. Parce qu’elle n’existe pas. Parce que se venger n’est ni classe, ni intelligent. La vie offre, elle-même, aux gens, les baffes qu’ils méritent. 

La vengeance est contre-productive, parce qu’elle donne de l’importance à ceux qui n’en ont pas. 

La vengeance est dévalorisante, parce qu’elle est une faiblesse. La preuve d’une dépendance à l’autre. La preuve qu’à un moment, on s’est trompé à leur égard. La preuve de notre propre manque de jugement.

En fait se venger, c’est montrer que l’on veut continuer à jouer avec celui qui nous a fait mal. 

Et puis, L’envie de vengeance n’est que le témoin de quelque chose qui a existé ; une amitié passée, un amour déçu, des croyances erronées… 

Alors, à toi petit étudiant de mon passé, je ne te dirai qu’une chose, merci pour ce moment.

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